La réform de l’ortograf

Voici un texte d’Alphonse Allais, écrit en 1893, que j’adore donner à mes élèves. Cet humoriste des temps passés leur permet de réfléchir aux différentes fonctions de l’orthographe et il suscite un débat sur cette idée de réforme….Décidément plus que jamais d’actualité aujourd’hui.

« La kestion de la réforme de lortograf est sur le tapi. Naturelman, il y a dé jan qui se voil la fass kom sil sajicé de kelk onteu sacriléj. Dôt-z-o contrer trouv ça trè bien. Kom de just, je fu lun dé premié interviouvé. Mon cher mêt parci, mon cher mêt parlà, ke pancé vou de cett réform ? Ce ke jan pans, cê tré simpl : je la trouv exélante

Jé même naré la grande coler dune dame ki sécrié : « Lortograf ! mé cé notr sauvgard, a nous zôt mondène ! Si  on suprim lortograf, coman pouraton fer la diférans entr une duchess é la demoisell d’in concierj ! »
Toubo, ma bel, toubo ! O ke voilà dès sentiman ki retard sur notr époc uniter é démocratic !Yatil donc une si grande diférans entre une duchess é la demoisell dun concierj ?

 E pui, par cé tan dinstruccion obligatoir, lé demoisell dé concierj en remontreré souvan a plu dune grande dam, ne vouzi trompé pa ! Koi kil en soi, ce projé de réform a lé plu grande chans dêtr adopté, sinon ojourdui, du moin dan peu de tan.

On écrira com on parl, é person ne san trouvera plu mal.

Ki nou dit ke no petit neveu ne se railleron pa de notr mani dimposé de tel form a tel mot pluto que tel ôtr ? « 

 

Il est vraiment formidable, ce texte, parce qu’il est drôle, il permet de convenir qu’un texte orthographié est tout de même plus facile à lire, mais il dénonce aussi la valeur sociale de la maîtrise de l’orthographe. Je l’adore: si quelques profs passent par là, je les encourage à s’en emparer, on a toujours une belle heure de cours autour de ce texte! (qu’on peut au choix transformer en langage SMS ou bien remettre en français correct). Je vous encourage aussi à présenter aux élèves un petit extrait de Montaigne dans le texte original ou bien d’un auteur du XVIIIème, pour voir combien à l’époque nous étions beaucoup moins conservateurs dans notre usage de la langue.

 

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